mercredi 25 mai 2011

La peur et l'acceptation de la faiblesse

 Si, dès mon plus jeune âge, j'étais très engagé dans la quête d'efficacité, c'est parce que je n'arrivais pas à m'accommoder de ma "peur". Un phénomène physiologique et psychologique qui engendrait un désordre dans ma tête que l'on pourrait appeler un complexe d'infériorité.

 A l'époque où je faisais du karaté, mon approche était tout particulièrement orientée vers le combat. Sans doute, de par ces expériences frissonnantes et palpitantes, j'avais pensé y avoir trouvé le moyen de tuer le "mou" en moi, transcender cette faiblesse de mon état constant de mal-vivre.

 Mon salut se trouvait dans les échanges de coups — mieux encore quand j'arrosais l'adversaire de coups, ça va de soi —, car à ce moment ultime de la violence, mon esprit était tout calme.

 A l'instar d'un matérialiste qui ne cesse d'acheter des choses pour combler sa soif d'avoir, je cherchais les conquêtes en combat. Mais le fait de réussir à vaincre un adversaire de taille ne m'a guère servi pour neutraliser ma peur, au contraire, cette conversation barbare moyennant la force musculaire qui décline avec âge et qui étaye l'idée que les forts terrassent toujours les faibles et que le fort absolu n'existe pas, ne faisait qu'alimenter ma peur d'incertitude.

 Sur mon chemin, j'avais rencontré beaucoup de pratiquants d'arts martiaux de tout genre, de très haut niveau, champions de toutes catégories, fondateurs d'une école, etc. Personne ne m'avait réellement convaincu, car ils étaient tous "très forts" et n'avaient "peur de rien".

 Depuis le jour où j'ai été admis au dojo de mon maître, j'avais hâte de lui poser les questions adressées aux dits experts :

 "Dans quel état d'esprit êtes-vous aujourd'hui face à la peur ? Comment être sûr de rester fort ?"

 Le jour où je réussis à les lui demander, j'eus une réponse qui me frappa l'esprit.

 "Je ne sais toujours pas me battre. Je me sens toujours faible et j'ai toujours peur. Mais je n'ai pas envie de mourir, donc je m'entraîne. C'est tout."

 La parole, si authentique et si humble à la fois, d'un homme qui avait frôlé plusieurs fois la mort en Chine m'avait vraiment frappé.

  Il ajouta, "Essaie de devenir le plus faible des faibles. Une fois touché le fond, tu n'as plus besoin d'avoir peur puisque nul n'est plus faible que toi. C'est parce qu'on est moitié fort et moitié faible qu'on est pris dans les pièges de la dualité." Et il continua, "L'apogée d'une extrémité engendre l'autre. C'est marrant, parce que chez moi, beaucoup abandonnent avant même de devenir complètement faibles. Et lorsqu'ils repartent, ils sont alors plus faibles que quand ils sont arrivés !"

 Dans tous les apprentissages, il est important de se mettre sur une "case départ". Celle des arts internes, c'est l'état d'un enfant qui vient juste de se mettre debout pour la première fois de sa vie. C'est de ce geste régi par les lois de l'Univers, dénué d'acquis artificiel que nous devons démarrer notre chemin.

 Le sourire d'un bébé n'inspire pas la peur...

2 commentaires:

  1. bonjour,

    J'ai une question bête:

    Es que un débutant qui a soif d'apprendre qui donne de la bonne volonté peut, malgré que la maitrise du qi soit très longue, malgré à votre question la réponse: "Je me sens toujours faible". Es que un débutant dans votre style peut acquérir un état d'esprit une sensation de force qui pourra lui permettre de s'en sortir le jour ou les choses se précipiterons ? (une agression par exemple)

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  2. S'il le désire, y croit et corrobore sa croyance en posant des gestes significatifs, afin d'acquérir la connaissance et la maîtrise,oui.

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